Mémoires d’en haut
Les archives orales de l’Éducation nationale
Bénédicte Girault
De 1991 à 2014, le Service d’histoire de l’éducation a mené une enquête orale sur les acteurs des politiques éducatives depuis la Libération. L’objectif était double: cerner le processus de décision et patrimonialiser la mémoire du ministère de l’Éducation nationale. De cette entreprise résultent près de 300 témoignages, plus de 1100 heures d’enregistrements. Ce livre explore l’hypothèse que les biais régulièrement décriés des archives orales peuvent devenir une ressource pour les historiens.
En retraçant l’histoire de cette enquête, Bénédicte Girault fait de l’archive orale l’objet central de son ouvrage. Sa déconstruction, à partir de l’analyse critique du projet et des pratiques des enquêteurs, permet de comprendre cette production mémorielle qui se revendique au service de l’histoire. Ces témoignages sont les expressions subjectives de consciences individuelles situées dans le temps, irréductibles les unes aux autres. S’en dégagent alors les cultures et les identités professionnelles qui ont structuré le ministère, et se retrouvent dans les mémoires actuelles.
La période couverte par l’enquête est celle de la conquête de l’État par les administrateurs de l’ENA qui, à l’Éducation nationale comme dans les autres ministères, évincent progressivement les administrateurs venus du terrain et les universitaires. En identifiant ces mémoires concurrentielles et leurs dynamiques à partir des discours, des valeurs, des épreuves et des modèles qui leur sont propres, ce livre participe à l’analyse des corps professionnels dans le cadre d’un ministère.